Au nom de la Commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, je viens de rendre un rapport budgétaire consacré aux crédits accordés au programme d’investissement France 2030 dans le cadre de l’examen du projet de loi de finance 2024. J’ai mené plus de 20 auditions pour alimenter mon rapport. France 2030 est un dispositif doté de 34 milliards d’euros, lancé en 2021 par Emmanuel Macron. Ce plan ambitionne d’« accélérer la transformation des secteurs clés de l’économie par l’innovation et de positionner la France en tête de plusieurs secteurs stratégiques du monde de demain ». Ces secteurs sont hétéroclites et concernent autant le développement de l’hydrogène, la production de véhicules électriques, l’alimentation, la santé ou encore le jeu vidéo.
Mon rapport évoque dans un premier temps de graves insuffisances du dispositif France 2030 : un grand défaut de planification et un véritable déficit démocratique, se traduisant par une stratégie industrielle incohérente. Je me suis ensuite concentré sur deux thèmes particulièrement importants pour notre territoire aveyronnais : la question de la mobilité à travers la production de voitures électriques et celle de la santé.
Concernant les voitures électriques, la pente prise par le Gouvernement laisse présager une France à deux vitesses dans l’accès à la mobilité.. Cette France à deux vitesses pourrait tout d’abord résulter du prix des voitures électriques : aucun des véhicules produits en France n’est vendu à moins de 25 000 euros, et il n’y aura probablement pas de marché de la voiture électrique d’occasion puisque la durée de vie de la batterie est de dix ans. Par ailleurs, un fossé risque de se creuser entre les Français ayant accès à des solutions de mobilité alternative, notamment aux transports en commun, et les autres, qui vivent dans des zones très rurales ou dans certains quartiers urbains. Des questions essentielles comme celle de la dépendance aux matières premières essentielles à la production des batteries de ces véhicules ou encore la dépendance à la production d’énergie pour les alimenter restent en suspens. La relation de l’Etat avec les producteurs doit aussi être revue en profondeur pour assurer un meilleur maillage territorial et une prise en compte des compétences existant dans les bassins désindustrialisés dans l’installation des nouvelles usines. Conditionnalité écologique et sociale des aides publiques versées aux constructeurs, soutien massif à la recherche de matériaux alternatifs ou de recyclage des métaux, production de véhicules électriques légers donc plus sobres et moins chers, voilà l’essentiel de mes propositions.
Pour le volet santé, le plan France 2030 passe complètement à côté de la question majeure de l’accès universel aux soins, voire risque à terme de l’aggraver. Il se structure essentiellement autour de l’objectif annoncé de produire 20 biomédicaments sur notre sol d’ici 2030. C’est un dessein surdimensionné et irréaliste selon l’unanimité des auditionnés. Ces nouveaux traitements, s’ils peuvent être révolutionnaires d’un point de vue thérapeutique, coûtent extrêmement cher à l’Assurance Maladie et peuvent menacer à terme l’équilibre financier de la Sécu. Se concentrer uniquement sur ces molécules innovantes, c’est surtout ignorer complètement les graves problèmes actuels de notre modèle de soins : tensions d’approvisionnement en médicaments du quotidien, manque pathologique de moyens, pénurie de soignants à tous les niveaux. Là encore, j’ai proposé diverses mesures, comme la mise en place d’un pole public du médicament pour assurer la production de médicaments du quotidien, des mesures pour améliorer la transparence sur les aides reçues par les grandes entreprises pharmaceutiques, ou encore l’application de la licence d’office.
Pour retrouver ma présentation de ces travaux et le rapport en intégralité :
Vidéo de présentation de l’avis budgétaire « Investir pour la France de 2030 » : Commission des Affaires économiques – Laurent Alexandre (laurent-alexandre.fr)
Pour prendre connaissance de mon rapport complet : Avis n°1723 – Tome IX – 16e législature – Assemblée nationale (assemblee-nationale.fr)